Il fait peu de doute que les techniques d’animation de groupe et d’intelligence collective sont bénéfiques à la conduite des projets. Les raisons sont multiples. Tout d’abord, elles permettent d’impliquer activement les membres de l’équipe dans le processus de planification et de prise de décision, ce qui favorise l’engagement et la motivation. Ces techniques permettent en outre de capitaliser sur la diversité des points de vue et des expériences parmi les contributeurs, ouvrant la voie à des idées et des solutions plus innovantes et adaptées aux besoins du projet. Elles favorisent enfin la communication et la collaboration entre acteurs projets, renforçant ainsi la cohésion et la solidarité au sein du groupe.

Le projet atteint ses objectifs, l’équipe est épanouie, tout le monde est content, fin de l’article. 

Fin de l’article ? Creusons un peu si vous en êtes d’accord.

Dans certaines cultures d’entreprises, ces outils sont, sinon absents, assez largement sous utilisés. Comment les y introduire ?

Il arrive qu’une session de travail échappe à l’animateur, se perde et n’atteigne pas ses objectifs. Comment éviter que cela n’arrive ?

La plateforme « outils et méthodes » de votre employeur déborde de « fiches atelier » prêtes à l’emploi. Vous vous sentez démuni face à cette profusion de solutions. Comment choisir ?

Nous nous proposons de répondre à ces questions (et à bien d’autres) par l’étude de la préparation d’un atelier puis de son animation. Nous passerons enfin en revue un florilège d’outils possibles selon l’objectif poursuivi : des plus classiques aux plus étonnants.

Objectif de l’atelier

En préambule, toute préparation d’atelier doit débuter par la définition du but recherché. S’agit-il de coconstruire la charte projet ? De coconstruire l’équipe ? De planifier le travail à réaliser ? D’identifier les risques ? D’améliorer un processus ? De créer un consensus ? Une convergence ? De l’adhésion ? De résoudre un problème ?

Le choix de l’objectif influe de manière déterminante sur les autres considérations. Il faut donc y consacrer le temps nécessaire sous peine de se rendre compte que l’outil ou les participants prévus ne permettent pas de répondre au (vrai) besoin, avec un changement de plan de dernière minute à la clé.

La correspondance fine entre objectifs et outils occupant la dernière partie de l’article, nous laissons volontairement la question de côté pour l’instant. Précisons juste que les outils ou techniques d’animation étudiées ici ne nécessitent pas de moyens autres qu’un animateur, un grand mur, des feutres et des post-its.

Participation

Deuxième point essentiel : la participation. Quelques règles générales se dégagent : 

  • Inviter prioritairement les acteurs du périmètre traité. 
  • Hors évènement d’envergure type séminaire, limiter le nombre de participants à une dizaine de personnes. 
  • Préférer deux animateurs à un seul : un pour encourager les débats, l’autre pour noter et garantir l’agenda par exemple.

D’autre règles relatives au choix des invités sont plus spécifiques : 

  • Pour une recherche de convergence, sélectionner des participants à même de porter de la vision et les enjeux de leurs services respectifs. 
  • Pour un objectif d’amélioration de processus type rétrospective agile, respecter le caractère intimiste de l’exercice et éviter les personnes extérieures (manager, sponsor, expert) risquant de perturber la libre expression. 
  • À l’inverse, s’assurer de la présence de la hiérarchie si l’on anticipe que les débats appelleront un arbitrage, un rappel du cadre ou des décisions passées.

Lieu, agenda, supports : les plaisirs logistiques

Le choix du lieu de l’atelier découle du nombre de participants et de leur capacité à se retrouver physiquement au même endroit au même moment. Il est fortement contraint par des considérations logistiques. Si l’animation est de grande ampleur (Séminaire, PI planning SAFe…) il est plus que recommandé de sécuriser la salle en la réservant plusieurs semaines voire plusieurs mois à l’avance.

Le temps des participants est précieux, l’agenda de la séance doit donc être finement ajusté. Quelques recommandations peuvent être partagées : 

  • Dans le cas d’un atelier visant à établir un livrable assez fourni comme une charte projet, une analyse de risque, le processus de gestion des ressources d’un programme : découper l’exercice en plusieurs modules permettant d’atteindre chacun un objectif intermédiaire (exemple : identifier les risques, les quoter, bâtir les plans d’actions). Ces modules pourront être consécutifs ou étalés dans le temps (1/2 j par semaine par exemple). 
  • Dans le cas d’un séminaire où s’enchainent plusieurs ateliers impliquant un grand nombre de personnes, prendre en compte les temps de déplacement et de changement de configuration (i.e. de séance plénière à travail en groupe et inversement) pour disposer d’un agenda réellement opérationnel.

Un dernier point à ne pas négliger réside dans la confection des supports utiles à son déroulement. Ces supports se présentent essentiellement sous forme de posters grand format à placer sur les murs. Deux familles se distinguent :  

  • Les posters contenant des visuels, graphiques, schémas pour l’information efficace des participants. 
  • Les posters destinés à recevoir et organiser les idées, questions et impressions du groupe.

Disponibles en continu sous les yeux des participants, ils faciliteront les échanges en agissant comme pense-bête ou rappel des discussions passées.

Un atelier, un séminaire, une cérémonie agile ne s’improvisent pas. Comme partout ailleurs, le temps investit en préparation permet un gain d’efficacité par la suite. La préparation sécurise également l’événement d’un point de vue émotionnel car se déroulant « sans filet » il peut générer nervosité ou angoisse chez les animateurs et les participants.

Suivant la portée de l’atelier, quelques réunions de préparation seront donc nécessaires pour une équipe réduite regroupant à minima le client/sponsor, l’animateur et une ou deux autres parties prenantes.

Rassurer et inclure les participants

Pour que l’atelier livre la valeur attendue, il est nécessaire que les participants interagissent fortement. La première activité de l’animateur est donc de créer un environnement suffisamment sécurisant pour que chacun puisse s’exprimer. Il y parvient à l’aide du triptyque espace – temps – règles permettant aux acteurs d’évoluer et de proposer sans crainte du jugement.

Les règles de vie doivent être fixées en début de séance avec les participants. En voici quelques exemples :  

  • Écouter activement et attentivement les idées des autres. 
  • Contribuer de manière égale et équitable à la discussion ou aux activités. 
  • Être ouvert aux feedbacks et aux critiques constructives. 
  • Etc.

Elles pourront évoluer si la situation l’exige.

À ce stade, si rassurant qu’il soit, notre triptyque manque un peu de chaleur. Les participants sont informés de ce que l’on attend d’eux, de ce qu’ils peuvent faire et ne pas faire. Forment-ils pour autant une communauté ? Pas encore. L’introduction de la séance est donc précédée ou suivie d’une activité d’inclusion, autrement appelée Ice-breaker. Si le nombre de variantes de cet exercice est quasiment infini, l’intention est commune : abaisser les tensions, les appréhensions et se connecter à l’autre. Quelques exemples :  

  • Le ballon de couleur : en cercle, se passer un ballon de couleur virtuel, puis deux, puis trois, sans se tromper. 
  • Qui a fait quoi ? Chacun écrit une anecdote de manière anonyme puis le groupe essaie de deviner l’auteur de chaque histoire. 
  • Placez-vous en ligne : chacun se place en ligne sur une échelle, en fonction de la distance qu’il a mis pour arriver à l’atelier ou de son ancienneté dans l’entreprise…

Faciliter !

Nous sommes désormais lancés dans l’exercice. Selon les outils choisis, il faudra donc créer des idées, les combiner, les améliorer, les clarifier, les estimer, les prioriser et souvent tout cela à la fois !

C’est le moment périlleux où l’animateur déploie son talent de facilitateur. Nous partageons volontiers ici quelques bonnes pratiques comme autant de boussoles pour guider l’action : 

  • Toujours prévoir un temps de réflexion individuel, c’est une condition sine qua non de la richesse et de l’équilibre des propositions. 
  • Ne pas laisser le groupe se perdre dans des sujets totalement ouverts. Préférer ainsi « Quels sont les facteurs qui vont renforcer X ou Y ? » à « qu’est-ce qui va faire que le projet marche bien ? ». L’idéal étant de poser des questions précises et non clivantes comme : « quels sont les objectifs du projet ? » 
  • Inciter les participants à la clarté, exiger une rédaction lisible, reformuler au besoin. 
  • Réserver des temps de prise de recul pour permettre le regroupement des idées, l’enrichissement des propositions, les vérifications de cohérence, la participation des introvertis ou l’exploration de nouvelles pistes.

À ce prix-là, et à ce prix-là seulement, pourra se construire une vision commune, transcendant les expériences et les peurs de chacun. Car ce que je vois comme une complexité n’en est pas une pour un autre participant et a contrario, quelqu’un d’autre peut mettre sur la table une complexité à laquelle je n’avais pas pensé.

Dernier point à garder en tête, il est essentiel que le groupe endosse le résultat de l’atelier.

Pour cela l’animateur accueillera toutes les idées dans la phase de divergence de l’atelier puis accompagnera reformulations et priorisations dans la phase de convergence pour un résultat assumé par toute l’équipe. Il conservera les idées jugées non prioritaires ou trop éloignées de la question et les mentionnera au compte rendu ce qui assurera transparence de l’exercice et reconnaissance des contributions.

Remercier et se projeter

Vient enfin le temps de conclure l’atelier où il importe de reconnaitre le travail réalisé et d’expliquer son utilisation future. Deux cas de figure se dégagent :  

  • Soit il s’agit d’une totale co-construction et le résultat est exploité tel quel dans la suite du projet. 
  • Soit l’atelier vise à produire des éléments « contribuant à » une analyse, un livrable, une feuille de route, le chef de projet s’autorisant à ne retenir qu’une partie des propositions en regard des contraintes (moyens, délais, techniques) appliquées au projet. 

La possibilité d’abandon d’une partie des réflexions induit un risque évident de frustration des contributeurs. L’animateur ou le sponsor avisé appliquera donc le principe de clarté maximale sur ce point dès le début de la démarche.

Le kit de survie du chef de projet

Impossible de poursuivre cet article sans évoquer les outils. Nous en listons ci-dessous deux par objectif recherché, comme un point de départ à enrichir de vos recherches personnelles.

Définir un état final souhaité 

  • Gros titres des journaux : pensez à l’avenir de l’entreprise en prédisant ce que pourrait dire la presse. 
  • Bateau à voile : découvrez quels sont vos objectifs et ce qui vous empêche de les atteindre. 

Améliorer le produit 

  • Proposition de valeur : exprimez clairement l’intérêt de votre service/produit, à qui il s’adresse et ce qui le rend unique. 
  • Personnage prototype : essayez de prédire qui utilise le produit et pourquoi, afin de pouvoir commencer à concevoir et tester avec les bonnes personnes. 

Cadrer le projet 

  • Énoncé du problème : rédigez un énoncé du problème qui capture les objectifs, les problèmes et les critères de réussite mesurables du projet. 
  • Carte des parties prenantes : Identifiez les parties prenantes de votre projet. 

Produire des idées 

  • Brainstorming : le grand classique, avec des post-its. 
  • Crazy 8 : générez des idées en masse. Huit idées folles en huit minutes ! 

Prioriser/estimer 

  • Matrice de priorisation : urgence vs importance, impact vs effort, risque vs connaissance, etc.  
  • Planning Poker : estimation d’effort s’appuyant sur la suite de Fibonacci. 

Améliorer un processus 

  • KISS : Keep, Improve, Start, Stop.  
  • Rétrospective des 4 L: Loved, Loathed, Longed for, Learned. 

Favoriser l’appropriation et l’adhésion 

  •  Market place : présentez votre projet aux parties prenantes au travers de stands organisés par grandes thématiques. 
  •  Marché des compétences : découvrez les compétences et les ambitions de chacun afin de comprendre comment vous aider mutuellement à grandir. 

Créer un consensus 

  • 1, 2, 4, all : générez et confrontez des idées en groupes de plus en plus grands et retenez les plus prometteuses. 
  • World café : générez et enrichissez des idées en petits groupes en changeant régulièrement de table. Convient pour les grands groupes. 

Anticiper les risques 

  • Identification des risques : identifiez les événements ayant un impact négatif sur l’atteinte des objectifs du projet. Déterminez leurs causes et leurs conséquences. 
  • Pre-mortem : réfléchissez à toutes les façons dont votre projet pourrait mal tourner afin d’en améliorer la préparation.  

Résoudre un problème 

  • 5 pourquoi : identifiez les causes racines de votre problème et ne perdez pas de temps à résoudre les questions superficielles. 
  • QQOQCCP : analysez toutes les facettes d’un problème à l’aide d’un questionnement systématique (Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? Pourquoi ?).

Derniers conseils

Voici pour terminer les derniers conseils issus de l’expérience de terrain de nos consultants eocen et IPMC qui les pratiquent au quotidien dans une grande variété d’environnement - projet, programme, organisation SAFe ou CODIR d’entreprise :  

  • L’objectif dicte la méthode ! 
  • Il est possible et même heureux de combiner les techniques. Appropriation puis création de consensus, Idéation puis priorisation, etc. 
  • Préparez, préparez, préparez ! 
  • Un atelier doit laisser un bon souvenir. Prévoyez temps d’inclusion et supports originaux. 
  • Une réunion doit être suivie d’effets, responsabilisez les acteurs en établissant une liste d’actions qui sera suivie selon le contexte par le chef de projet, le Scrum Master, le PMO. 
  • Les rendez-vous collectifs exercent une influence sur la maturité émotionnelle de l’équipe. Soyez-en conscient… et utilisez cet outil à bon escient !

Vous voici désormais paré pour l’aventure. Nous vous souhaitons une pleine réussite pour votre atelier et vous disons à bientôt sur votre projet actuel ou celui d’après !  

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